Comme les vacanciers sur la route des vacances, les fourmis sont confrontées aux bouchons. Mais elles gèrent leurs embarras de circulation d’une manière bien différente des humains, comme l’a récemment montré une équipe internationale de chercheurs.
Les sociétés d'insectes, comme les sociétés humaines, sont confrontées à des problèmes de circulation et d'embouteillages, qui peuvent par exemple survenir chez des espèces de fourmis formant de grandes colonies, dont l'activité de récolte s'organise à partir d'un réseau de pistes balisées chimiquement.
Pour prévenir la formation d'embouteillages sur ces pistes, les fourmis ont des règles comportementales grâce auxquelles l'organisation spatiale des flux s'adapte automatiquement aux contraintes du milieu, selon une équipe internationale de chercheurs, associant l'Université Paul Sabatier de Toulouse, le CNRS, l'Université Libre de Bruxelles et l'Université technologique de Dresde. Dans leur étude publiée dans Nature jeudi, ils expliquent que "les mécanismes permettant à une colonie de maximiser l'apport de nourriture au nid reposent sur un bon équilibre entre conflit et coopération".
La plupart des organismes vivant en groupe sont soumis à des phénomènes d'interattraction, indispensables au maintien de la cohésion du groupe, mais qui peuvent être préjudiciables si la concentration d'individus dans un endroit donné devient trop importante. A l'extrême, une densité trop élevée peut conduire à une paralysie totale. Celle-ci est évitée si des mécanismes de dispersion entrent en action, à l'exemple de ce que l'on constate avec l'espèce humaine, dans les déplacements collectifs de piétons.
Les fourmis se déplacent bien souvent le long de pistes bien définies. A l'origine de ces pistes, se trouve une trace chimique -
une phéromone - déposée par une ouvrière exploratrice revenant à son nid après avoir découvert une source de nourriture. Cette phéromone permet de recruter d'autres ouvrières qui vont emprunter la piste pour se rendre à la source de nourriture, et la renforcer lors de leur trajet retour. Ces pistes sont l'équivalent des sentiers que les animaux génèrent involontairement en se déplaçant.
Lorsque les fourmis ont la possibilité d'emprunter différents chemins, on observe, à faible densité, qu'un seul chemin est majoritairement emprunté par les fourmis, suivant la piste balisée par la phéromone. Mais les chercheurs ont observé que lorsque la densité des fourmis atteint un certain seuil, on assiste à un "changement brutal de l'organisation du trafic", visant à utiliser tous les chemins possibles pour fluidifier le trafic. Une réorganisation spontanée… sans feux rouges, et sans officier de circulation. Ce seuil, ont observé les chercheurs, correspond précisément à la densité au-delà de laquelle la réduction dans la vitesse de déplacement n'est plus compensée par les avantages liés à l'utilisation d'un seul chemin.
source : lci.tf1.fr